Retour Page Accueil site   Retour Page Accueil mémoire          Retour table des matières

II. Les personnes âgées, une histoire en mouvement :

     Dans le parcours de l’histoire et dans les documents que l’on a pu retrouver, la personne âgée apparaît tantôt respectée, tantôt vilipendée. Tout en décrivant ce cheminement de la différence due à la vieillesse, il convient auparavant d’en définir la nature.

II. 1. Qu’est ce que la vieillesse ?

     L’encyclopédie[1] définit la vieillesse comme le dernier âge de la vie se traduisant par la diminution de toutes les activités, ou bien le grand âge de quelque chose et enfin comme l’appellation des personnes âgées en général. Il y a déjà une notion de finitude, et de faiblesse : dernier âge et diminution de toutes les activités ; ce n’est pas une définition positiviste, mais plutôt brute, nette tranchante, définitive.

     « La vieillesse n’est pas une maladie bien qu’elle en soit devenue synonyme, elle n’a d’existence que notionnelle, elle nous attend tous ; c’est avant tout, en amont, une question d’imaginaire et, en aval, d’imagination (ou d’images) »[2]

     « La désignation des personnes âgées est associée aux représentations de la vieillesse. Vieux ou vieil dont le féminin est vieille, apparaît en 1080 et vient du latin vetulus, diminutif de vetus. En tant qu'adjectif désignant une personne, il s'oppose à jeune. Il fait référence à l'âge chronologique : est âgé celui qui a vécu longtemps. »[3]

     Il faut cerner les définitions qui permettent d’appréhender le concept du vieillissement et celle ci paraît la plus objective et neutre :

«La vieillesse est une période inévitable et naturelle de la vie humaine caractérisée par une baisse des fonctions physiques, la perte du rôle social joué comme adulte, des changements dans l'apparence physique et un acheminement graduel vers une diminution des capacités.»[4]

     Ce n’est pas tant le mot vieillesse qui fait peur mais ses représentations, les connotations abusives, le coût économique évalué et répété inlassablement par des médias souvent relais d’hommes politiques qui n’ont pas l’objectivité de débattre ; seulement de dire que c’est un problème de société et qu’il faut absolument le résoudre dans l’urgence ! Une urgence qui dure depuis la fin des trente glorieuses. Mais le mal est fait, les informations partiales sont assenées, et la vieillesse coûte.

II. 2. La vieillesse dans l’histoire.

     Les représentations de la vieillesse changent selon les individus, les civilisations et les époques, et sa perception est souvent induite par le regard de l'autre.

     Les Egyptiens redoutaient et évoquaient la perte des facultés et le ralentissement des fonctions chez la personne âgée ; Ptahhotep, vizir auprès du Roi de Haute et Basse Égypte, Isesi, lui dit :

 « O souverain, mon seigneur, le grand âge est maintenant arrivé, la vieillesse s'est abattue (sur moi) ; la déchéance sans cesse se renouvelle, après s'être imposée. On somnole tout le jour ; les yeux sont malades, les oreilles sourdes ; la force disparaît car le cœur est las, la bouche, silencieuse, ne parle plus. Le cœur ne pense plus, il ne se souvient même pas d 'hier. Les os sont douloureux à cause de la longue durée de la vie. Ce qui était le bonheur devient maintenant le malheur ; toute sensation a disparu. Ce que fait la vieillesse à l'homme est mauvais, en toute chose. Le nez ne respire plus. Se tenir debout comme s'asseoir est également pénible. Permets donc que l'on ordonne à ton serviteur de se constituer un bâton de vieillesse, afin que je puisse lui dire les paroles de ceux qui autrefois ont écouté, et les conseils des ancêtres qui obéirent aux dieux. Alors, on fera de même à ton égard, les maux seront repoussés loin du peuple d'Egypte et les Deux Rives travailleront pour toi »

     Dans la bible la vieillesse est représentée par le patriarche âgé parfois de plusieurs centaines d'années.

     Depuis l'antiquité, les Chinois pensent que la vie de plusieurs générations sous un même toit représente le premier bonheur sous le Ciel Baoding est une ville réputée pour la longévité de ses habitants. Les habitants de Baoding ont gardé l’habitude de fortifier la santé, et toute la société s’y adonne, tant les personnes âgées que les jeunes. De ce fait, l’espérance moyenne de vie des habitants de Baoding est nettement plus élevée que dans le reste du pays. Chaque année, la fête du Respect des personnes âgées et de la Constitution physique s’y déroule du 9 au 15 octobre.

    Dans la Sparte antique, la Gérousia, était un conseil d'anciens (les gérontes) créé dès l'époque homérique en tant que conseil du roi. Ce nom fut conservé dans les États oligarchiques, où les anciens des grandes familles constituaient des conseils restreints comme en Crète ou à Sparte. Pour accéder à la gérousia il faut atteindre l’âge de 60 ans (ils sont 28 gérontes et deux rois, ils préparent les lois présentées à l’assemblée ; la gérousia est aussi la haute cour de justice pour les affaires criminelles)

     Plutarque, figure emblématique de l’hellénisme, dans ses œuvres morales encense la vertu de la vieillesse :

«  l’histoire montre que c’est souvent dans leur vieillesse que les hommes d’Etat donnent le meilleur d’eux-mêmes… La vieillesse, privée des voluptés physiques, doit se ménager des plaisirs d’ordre moral, et les plus nobles et les plus grands de ces plaisirs sont ceux que réserve le service de l’Etat. »[5]

     Plutarque exprime son sentiment en dénonçant l’otium, problème débattu en Grèce et à Rome, régions où ce concept représentait une haute valeur « c’est l’oisiveté qui ruine les forces de l’esprit ; l’exercice les entretient »[6] Plutarque a formulé cette hypothèse au début du 1er millénaire, y avait il des déficiences dans « l’esprit » de ses contemporains âgés ? Aujourd’hui, nous avons des ateliers mémoire pour maintenir l’esprit en éveil.

     Le moyen âge nous donne l’image traditionnelle du troisième âge telle qu’elle s’impose jusqu’au milieu du 18e siècle : les vieux moines et les guerriers âgés sont respectés alors que les femmes âgées seules sont mal traitées ; si les textes médicaux ne s’intéressent qu’au corps de l’homme dans la force de l’âge, cette discrétion s’explique par la volonté de Dieu qui est que l’homme vieillisse et meure.[7] Et s’il est vrai que dans la pratique, il y eut nombre de dirigeants âgés, il est fait allusion aux risques de défaillance physique de ces derniers. L’avarice est peinte sous les traits d’une vieille femme…la vieillesse est châtiment du péché et image du péché.[8]

     La Renaissance voit la population française augmenter et vieillir, c’est une période où la jeunesse est magnifiée. C’est l’âge sombre de la vieillesse. La réhabilitation ne viendra qu’avec l’institution républicaine.

    La Révolution grâce aux registres d'état civil permet un comptage de population et la prise en compte des tranches d’âge. Dés 1790, la constituante fut saisie de la préoccupation de soulager les personnes âgées. C'est la Convention qui consacre son sort et le fixe par un décret du 28 juin 1793: «Le vieillard indigent sera secouru aussitôt que l'âge ne lui permettra plus de trouver dans son travail des ressources suffisantes contre le besoin.» Plus tard « la loi du 7 octobre 1796 proclama le principe de responsabilité communale en matière d’assistance ; celui de l’assistance nationale était rejeté »[9], cette loi préfigurant déjà la charge départementale actuelle de l’allocation personnalisée d’autonomie (A.P.A.) ; le XVIIe siècle voit apparaître aussi le principe de la retraite.

     Le XIXe siècle qualifié par certains auteurs de siècle de la gérontocratie, montre le rejet ou l’exaltation d’un âge qui devient un problème de société ; les premières statistiques et enquêtes apparaissent : en 1800, comme en 1900, prés de 10% de la population Européenne à plus de 60 ans, et la population à presque triplé durant le siècle. La question sociale intègre désormais la protection de la vieillesse.

     Le XXe siècle verra l’apparition de la gériatrie et de la gérontologie ; la loi de 1910 sur les retraites entre en vigueur, comme les œuvres destinées aux âgés pauvres se développent pour pallier à l’insuffisance du système de retraite ; la TD réalisée soulèvera le problème de la prise en charge des personnes âgées (versement des pensions de retraite et aide à l’autonomie)

     Le vieillissement est perceptible, différents signes le permettent ; la vieillesse a des contours beaucoup plus flous. Peut–être est-elle due aux regards des autres ?

II. 3. Qui est vieux ? La représentation sociale de la vieillesse.

     « Un vieux est un vieux et nul autre.  Mais l’Occident contemporain peut légitimement, en fonction de ses causes et de ses convictions, grouper ses vieux sous la rubrique globale du troisième âge »[10]

     « Si dans le mot vieux il y a le mot « vie », nous pouvons aussi y repérer le pronom personnel « eux », qui fait du vieux un autre plus âgé : le vieux c'est l'autre. »[11]  Mais il faut en permanence garder à l’esprit le fait que l’âgé est humain « On n’est pas moins humain quand on est jeune ni plus humain quand on est vieux, on est plus ou moins humain du début jusqu’à la fin. »[12] Il faut en finir avec la représentation de l’être humain :

« Qu’il soit noble ou sauvage, seul ou en horde, l’Homme Primitif est de sexe masculin, du type européen et sur la trentaine !… Dans les Nativités, Marie fait plus mure que la jeune vierge qu’elle était effectivement à l’époque, et dans les Pietà ou autres Dormitions, elle fait nettement moins vieille qu’elle ne le fut réellement aux moments en question.  Et même le paradigme plus profane de l’Eternel Féminin (Die Ewige Frau) ne fait que rarement son âge ! – ni jeune adolescente boutonneuse ni vieille sorcière verruqueuse, mais une sorte de nymphe diaphane. »[13]

     La nature de l’être humain c’est d’être jeune, adulte et vieux, et de former un continuum, sauf accident de vie,  de reconnaître son image lors de son cheminement, et de savoir qu’elle change avec le temps.

     La croissance de la longévité au siècle dernier a favorisé l'émergence d'une catégorie sociale distincte, les plus de 60 ans, on assiste à la multiplication des termes servant à nommer les individus de cette classe d'âge.

     La vieillesse est une construction sociale et « les catégories d’âge ne sont pas seulement des éléments structurants de la société, elles en sont aussi le produit »[14]

     La représentation sociale de la vieillesse désigne les personnes âgées auxquelles sont rattachés de nombreux termes, souvent péjoratifs :

     D’autres adjectifs viennent souvent accompagner l’image de la vieillesse : radin, moralisateur, dur de la feuille, impuissant, coureur de jupons, lubrique

     L’utilisation d’euphémismes permet d’atténuer souvent la portée des mots dans la conversation courante pour diminuer leur valeur de stigmatisation, mais quelquefois ces euphémismes, selon la phrase dans laquelle ils sont employés peuvent devenir des agents de coloration négative.

     Les personnes âgées sont souvent stigmatisées car « la modernité tend à faire de la vieillesse un stigmate, elle érige en principe le refoulement de la précarité et de la mort, elle repose sur un imaginaire de toute puissance et de vitalité ».[16] Le vieillard a un corps indésirable et la femme est doublement réduite à son corps (le miroir et la balance ont pris le rôle du prie-Dieu) : en vieillissant et plus jeune, car la définition identitaire féminine se fait autour du corps. Les femmes âgées qui ont la barbe soit demandent d’être rasées, épilées, car elles gardent le stéréotype de la féminité, ou bien elles ne le demandent pas, elles ne s’occupent plus d’elles.

II. 4. La stigmatisation de la vieillesse

     C’est Erving Goffman[17] qui a développé le concept de la stigmatisation ; le stigmate, pour lui, correspond à  toute caractéristique propre à l’individu qui, si elle est connue, le discrédite aux yeux des autres ou le fait passer pour une personne au statut moindre. Ils distingue trois catégories de stigmates : les stigmates corporels, les stigmates tenant au passé ou à la personnalité de l’individu et les stigmates tribaux. Les personnes âgées appartiennent en général à la première catégorie : les handicaps physiques, les troubles de la vision, de l’audition, les défauts du visage ou du corps les concernent et sont liés au vieillissement. Les aînés peuvent être concernés aussi par la troisième catégorie lorsqu’ils sont issus de l’immigration, dans ce cas la stigmatisation est plus sévère. Pour Goffman, la situation de normal et de stigmatisé ne sont pas des attributs du sujet, mais le produit de points de vue résultant de l’interaction. Hors, la stigmatisation par les mots, tels que ceux qui sont employés pour nommer les personnes âgées, dont certains ont été évoqués dans le paragraphe précédent, est bien mal perçue par les aînés qui les évitent lorsqu’ils parlent d’eux ; ils n’emploient que des mots plus doux comme grand-père, grand-mère, ou des termes plus valorisants tels que senior ou master qui ramènent au rôle social de transmetteurs de savoir.

     Robert Murphy[18] va développer ce concept en vivant la situation de stigmatisé à l’intérieur de son handicap ; il est atteint d’une tumeur sur la colonne vertébrale entraînant une infirmité progressive. Au cours de sa rééducation il ressent les échecs comme le résultat d’efforts insuffisants, renforçant sa culpabilité qu’il décrit comme corollaire de l’invalidité. Le phénomène le plus marquant chez le stigmatisé, qui peut être lié aux problèmes concrets de la vie de tous les jours, est la perte d’estime de soi, dans la cas de Murphy, son handicap réduit son libre arbitre et en cas d’hospitalisation, cette perte d’autonomie aboutit à une dépersonnalisation et par l’absence de projets à long terme.

II. 5. La reconnaissance de la personne âgée

     Ici intervient la notion de reconnaissance de l’autre, du regard de l’autre et du regard sur l’autre. « Notre meilleure expérience de l’autre le ramène à ce qui nous sépare de lui, mais dans une ensemble de représentations qui sont les nôtres. »[19] La reconnaissance peut être organisée autour de trois significations principales : l’identification, la reconnaissance de soi et la reconnaissance mutuelle. La reconnaissance va de pair avec le risque de méprise et par là même de méconnaissance pouvant aller jusqu’au mépris vis-à-vis de l’autre. Jean Blain dans un article sur Paul Ricœur termine par

« Mais seule toutefois, aux yeux de Ricœur, la gratitude, forme ultime de la reconnaissance, permet, par l'échange des dons et au-delà de la lutte toujours inachevée pour la reconnaissance, de conjuguer mutualité et dissymétrie entre le donateur et le donataire, bref de trouver la juste distance à l'autre. »[20]

     Dans la reconnaissance de soi les personnes âgées traversent deux stades selon leur avance en âge ; selon le Professeur L’écuyer :

« Le premier - celui de la reviviscence du soi (entre 58-60 et 75-77 ans) - indique que, suite à la réorganisation qui prend certain temps et où le concept de soi comporte plus d'aspects négatifs qu'auparavant, il y a ensuite récupération et reprise plus positive au-delà de 70 ans, d'où le nom de reviviscence… Le second - celui de la sénescence du soi (entre 78-80 et 100 ans) - est marqué par une restriction progressive du champ perceptuel et, par conséquent, de la variété des différentes perceptions de soi. »[21]

     Ce phénomène paraît directement lié à la réduction du cadre de vie auquel les personnes âgées sont de plus en plus limitées, à la diminution des expériences nouvelles, en somme à l'appauvrissement de l'environnement matériel et social. Les personnes âgées sont ainsi de plus en plus limitées à une simple routine dont elles ne peuvent tirer que très peu pour le renouvellement et l'enrichissent de leurs propres perceptions d'elles-mêmes, surtout à partir de 85 ans.

     La reconnaissance du rôle des personnes âgées n’est jamais trop divulguée ; nous pouvons observer :

-         leur rôle dans la vie associative : resteront-ils toujours motivés ? Surtout ceux de la génération montante qui ont subi les assauts du libéralisme ; les extrémistes libéraux produisent des chiffres qui stigmatisent le coût de leur génération avec des arguments paradoxalement anti-libéraux. En effet, beaucoup de sociétés capitalistes américaines envient notre système de santé et de retraite par répartition, qui diminue le coût des cotisations, car elles sont obligées de payer des prix exorbitants pour assurer leurs salariés, quand elles veulent bien le faire.  

-         leur rôle de transmetteur de mémoire, de savoir-faire.

-         Leur rôle financier envers leur ascendants ou de leur descendants plus fragiles.

-         Leur puissance économique avec les fonds de pension qui peut influer sur la marche des entreprises. Ils possèdent 60% de la richesse française.

-         Leur rôle de consommateurs dans l’économie nationale.

-         Leur rôle dans l’action politique ; ils sont plus instruits que leurs aînés, et plus disponibles.

-         Leur rôle dans le moteur économique des établissements de soins de suite et de réadaptation (SSR) et les établissements pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ; les groupes privés à l’instar de Medipep, n’hésitent pas à dire que la dépendance est un marché porteur[22], et réalisent de bonnes marges bénéficiaires : 2672K€ de résultat net pour l’année 2000[23]

-         Le rôle des femmes, qui sont souvent le pivot du soutien des aînés et de la famille.

-         Leur rôle de grand-parents pour l’éducation des petits, pour l’organisation de la de la vie des jeunes ménages.

II. 6. La méconnaissance des personnes âgées :

-         La société qui impose aux aînés deux injonctions contradictoires : rester jeunes et accepter d’être son âge.

-         Le coût de la retraite et de la santé est la principale préoccupation qui stigmatise les personnes âgées : elles ne produisent pas et elles coûtent. Pourtant en ce qui concerne la santé, « la médecine coûte plus cher que le social. L’essentiel des dépenses de santé des personnes âgées est dû à une surconsommation de techniques coûteuses générée par le modèle biomédical actuel. L’importance de ces dépenses soulève avec acuité la question de l’efficacité des politiques de santé. Un nombre limité de traitements spécifiques ont prouvé leurs bénéfices. »[24]. Et en ce qui concerne la retraite, de nombreuses polémiques viennent alimenter le projet de retraite par capitalisation ; le système de retraite par répartition, aménagé ne serait pas du tout en danger.

-         Dans un journal télévisé de 20 heures du 10 juin 2004, un reportage (à l’emporte pièce comme peuvent l’être les reportages effectués dans un laps de temps si bref) se déroule dans un service où l’on soigne des enfants cancéreux, et la journaliste commente : « Ici, de façon plus dramatique qu’ailleurs, nous sommes confrontés à la douleur du soin, à la mort», de façon plus dramatique, pourquoi ? N’y a t’il pas souffrance chez le jeune adulte, ou chez l’âgé confrontés aux mêmes espaces de soin, aux mêmes peurs ? Existe t’il une gradation dans la commisération envers les classes d’âge ? Dans l’imaginaire régnant, le jeune malade peut être totalement guéri, là où le vieux ne peut que devenir de plus en plus malade.

     La reconnaissance passe par la relation à l’autre, et s’insinue le pouvoir des uns ou des autres, sur les uns ou les autres. Beaucoup d’auteurs commentent ce qui apparaît comme un nouveau pouvoir : «  le pouvoir gris » ; le groupe social en expansion  des personnes âgées représentera un pouvoir par le nombre, par l’effet générationnel, par une influence sur les élections et sur les politiques instaurées en faveur du groupe ; mais, ce pouvoir, arrivera t’il à se structurer de façon homogène, arrivera t’il à surmonter sa faiblesse dans la capacité à protester ? Peut-être pourra t’il se structurer grâce à l’«empowerment».

     L’« empowerment » induit une remise en question des rôles et des modes d’occupation à la retraite…il est utilisé dans le discours militant des organisations de seniors américains pour les inciter à s’approprier ou se réapproprier des rôles sociaux, politiques ou économiques.»[25] Encore faudra t’il que les individus sortent du conditionnement social intériorisé à travers les normes sociales véhiculées par l’Etat et la société.

     En sachant que le pouvoir est question de soumission et de domination, il ne faudrait pas que cet « empowerment » se construise sans la participation des toutes les composantes de la société. « Le pouvoir ne précède ni ne détermine la division entre soi et l’Autre. Il accompagne des procès de différenciation sociale, en travaillant à se transformer lui-même dans le discours qu’il tient sur l’autre, comme dans la création des institutions de différentiation. La division entretenue entre soi et l’Autre s’insinue et s’installe en empruntant des voies nombreuses, complexes et souvent inattendues. Dans tous les cas, la relation à l’Autre est de domination ou de soumission. »[26]

 


[1] Encyclopédie Universalis multimédia version 7.

[2] Singleton Michael (juin 2002) Devenir vieux-ailleurs et autrement. Notes de lectures, version doc. Complète. Site Ouaibe de l’Université Catholique de Louvain. Département des sciences de la population et du développement. Documents de travail SPED. 87 p.

[3] Martin Sanchez Marie-Odile(janvier 1999-février 2001) Maîtrise en Sciences de l'Education. Université PARIS XII Val de Marne. Faculté des Sciences de l'Education et Sciences Sociales.

[4] Mishara B. R, Riegel R. G (1984) Le vieillissement. Presses Universitaires de France. Paris.

[5] Plutarque(1984) Œuvres morales. Les Belles Lettres. Paris. p. 53.

[6] Plutarque. Op. cit. p. 54.

[7] Gutton Jean-Pierre.( 1988) Naissance du vieillard. Aubier. Paris. p.11.

[8] Gutton J.Pierre. Op. cit. p. 24.

[9] Gutton J.Pierre. Op. cit. p. 173.

[10] Singleton Michael. (11 au 16 mars 2002)  Devenir vieux-ailleurs et autrement. Notes de lectures du congrès international : « Vivre et soigner la vieillesse dans le monde ». Gênes.

[11] Mias Lucien. Je ne deviens pas vieux, je me patine.  http://membres.lycos.fr/papidoc/540vieillisvieillesse.html

[12] Singleton Michel. Op. Cit.

[13] Singleton Michel. Op. Cit.

[14] Rosenmayr Leopold (1983) « Les étapes de la vie », in Le continent gris. Seuil, Communications. n° 37, page 89.

[15] Astruc Sylvie (2001) « Voulez-vous surfer gr@nd-père ? », les seniors et le cybermonde : entre communication sociale, éducative, citoyenne et communication commerciale. Maîtrise de l’information et de la communication. CELSA - Université de Paris IV – Sorbonne ; école de hautes études de l’information et de la communication. Paris.

[16] Le Breton David (printemps 1995) Le visage et la sacré, quelques jalons d’analyse. In Religiologiques, n°12. p. 49-64.

[17] Goffman Erving (1975) Stigmate, les usages sociaux des handicaps. Les Editions de Minuit. Paris.

[18] Murphy Robert (1990) Vivre à corps perdu. Terre humaine, Plon. Paris.

[19] Schaffhauser Philippe(2004) Remarques sur quelques problèmes épars de reconnaissance de l’autre. In Les formes de reconnaissance de l’autre en question, ouvrage collectif. Actes du colloque international de mai 2000. Presses Universitaires de Perpignan. p. 423.

[20] Blain Jean (février 2004) Reconnaître dans tous les sens. In Revue Lire.

[21] L’écuyer René (1978) Le concept de soi. Presses Universitaires de France . Paris.

[22] Rapport annuel MEDIPEP (2000). http://www.medidep.com/comm_fi/rapport_annuel_2000.PDF. Page 9.

[23] Rapport annuel MEDIPEP. Op. Cit. p. 59.

[24] Henrard Jean-Claude (février 2000) Interview du magazine L’impatient, Alternative Santé.

[25] Viriot Durandal Jean-Philippe (2003) Le pouvoir gris. Presses Universitaires de France. Paris. p.432.

[26] Ben Naoum Ahmed (2004) Pouvoir de l’Autre, Pouvoir sur l’Autre. In Les formes de reconnaissance de l’autre en question, ouvrage collectif. Op. Cit. p. 506.

Retour Page Accueil site   Retour Page Accueil mémoire          Retour table des matières