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Des pistes pour l’avenir : la géragogie, et le développement des échanges intergénérationnels.

     Deux facteurs de protection contre le vieillissement font l’unanimité, l’intellect et le mariage (B. Cyrulnik). Intellect ne signifie pas intelligence mais faire marcher sa tête, pour lire ou écrire, surtout pour diriger une association, donner des conseils de gestion ou de fabrication. Intellect signifie avoir un projet en tête.
     Faut-il proposer et encourager la formation des personnes âgées et les relations inter-générationnelles ? Pour beaucoup de gérontologues il faut tourner la page, et à la place du concept en place actuellement, formation, travail, retraite, étalé sur la vie de l’individu, il faudrait adopter celui-ci : formation, activité, loisirs étalé par tranches de vie de l’individu.

âges

De 14 ans à 20/25 ans         De 20/25 ans à 50/65ans        De 50/65ans à plus

Situation actuelle

    Formation

      Activité

       Retraite

Situation à privilégier

Formation

Activité Loisir Formation Activité Loisir Formation Activité Loisir

La géragogie

     Pour J.Richard, la géragogie s’intéresse aux processus éducationnels de la personne âgée. Elle complète l’éducation, qui, à d’autres âges, prend le nom de pédagogie pour l’enfant et d’andragogie pour l’adulte. Elle s’inscrit dans la perspective d’une éducation permanente. Elle est une manière de faire respecter à chaque âge, l’essence, l’originalité et le caractère unique de l’individu en tant que personne. Elle est le moyen de faire de lui l’agent même du changement en l’aidant à s’adapter aux variations de l’environnement et à en modifier, si nécessaire, les données.

    E.Dirkx, souligne que dans l’âge avancé l’éducation pourrait avoir un rôle de substitution aux activités antérieures, concourir à combattre les effets physiques et psychiques néfastes du vieillissement, l’éducation pourrait investir d’autres buts que ceux antérieurement choisis et donner un sens à sa vie.

      La géragogie peut rétrécir le fossé qui existe entre générations, et au plaisir d’agir les âgés peuvent réduire le seuil de tolérance à l’ennui et apprendre à structurer leur temps libre.

     J.Richard pose le principe d’un nouveau concept, la psychogéragogie, qui serait un volet spécialisé de la géragogie, pour apporter un soutien psychologique à la personne âgée dans son parcours éducatif ; en tenant compte des facteurs cognitifs et affectifs dans l’appréciation des capacités de la personne et en utilisant les moyens éducatifs pour pallier les difficultés qui surgissent dans la vie de tous les jours. Elle vise à établir une relation humaine susceptible de modifier le comportement souvent pessimiste de l’âgé. Dans le domaine des conduites, la normativité représente cette capacité de l’individu à riposter à un monde complexe, à inventer à chaque instant de nouvelles normes de conduites, chez l’âgé la formation prendra la forme d’une participation à la modification des normes individuelles et sociales.

     Cinq objectifs pour l’éducation de la personne âgée (S.L.Willis):

     L’évolution des données techniques et socioculturelles est rapide, il est important pour que la personne âgée ne mette pas en danger son intérêt et celui de sa communauté de vie de la préparer à affronter ces changements.

     Les universités du temps libre (UTL) et leur structure existante pourraient servir de base au projet géragogique ; elles intéressent surtout les classes sociales favorisées, ayant déjà un bagage culturel important, et leurs programmes sont souvent limités à des cycles de conférences abordant des sujets pointus ; pour suivre il faut déjà maîtriser de nombreux paramètres cognitifs et une connaissance de base que ne possède pas la grande majorité des personnes âgées. Les intervenants sont pour une grande majorité des professeurs de faculté, qui se sont toujours adressés à un public jeune et spécialisé ; ils n’ont pas les moyens de connaître l’auditoire et de lui apporter les outils nécessaires à son entendement, sauf, comme je le citais plus haut s’il s’agit d’un auditoire élitiste. Un des problèmes de  l’UTL est sa localisation centraliste liée à la difficulté de déplacement des aînés. Le projet géragogique doit s’accompagner de la présence de structures décentralisées, avec des troncs communs aux différentes générations, pour permettre l’échange et/ou il doit s’orienter vers des outils de vulgarisation des nouvelles technologies comme l’informatique, l’Internet; apprendre aux anciens l’utilisation de ces outils; il faut aussi ouvrir les bibliothèques municipales, universitaires et disposer de livres à grande écriture par exemple.

     Dans le cadre du programme Biblex de lutte contre les exclusions dans l'accès au livre et aux autres supports Maryse Oudjaoudi, de la bibliothèque municipale de Grenoble, est partie d’un constat pour déterminer un public cible : « Le vieillissement de la population (20% de la population française a plus de 60 ans) ne semble pas avoir d'incidence directe sur la fréquentation des bibliothèques. A Grenoble, la tranche d'âge des plus de 56 ans représentait à peine 10% du lectorat en 1996. Différentes enquêtes sociologiques, et notamment celles analysant les pratiques culturelles des français, montrent que l' " on vieillit comme on a vécu ", selon la couche sociale de population à laquelle on appartient

     Les non-lecteurs et les faibles lecteurs, et à fortiori les personnes en situation d'illettrisme et de marginalisation, n'utiliseront pas leur temps libre pour prendre le chemin de la bibliothèque. Par contre, ceux qui avaient une pratique régulière de lecture deviennent souvent de gros lecteurs.

     Le milieu professionnel de la gérontologie est complètement étranger au milieu bibliothécaire. Nous n'en connaissons ni les institutions, ni les structures ni le fonctionnement. Aucun partenariat ou presque n'a pu se développer sur les quartiers avec ces intervenants en direction des personnes âgées. Nous sommes confrontés à la fois à la faible fréquentation de nos bibliothèques par les personnes âgées, et à la méconnaissance des professionnels de la gérontologie qui pourraient être les médiateurs entre notre offre de lecture et les personnes du troisième âge. C'est pourquoi nous avons choisi comme public-cible nos "anciens".

     Une politique de développement de la lecture doit donc prendre en compte le public des personnes âgées mais aussi le milieu professionnel de la gérontologie, afin que la sortie de l'âge actif devienne véritablement " un nouvel âge pour lire ". Une démarche de formation est à construire en direction des professionnels des bibliothèques, en insistant sur quatre points:

    1. La connaissance des personnes âgées

     2. La connaissance des lieux où l'on peut atteindre ces publics est à développer. Notamment dans le cadre d'une politique " hors les murs " de la bibliothèque; les foyers, les domiciles collectifs, les maisons de retraite, les services sociaux divers, les services hospitaliers (longs séjours, hospitalisation à domicile), les centres de gérontologie.

     3. La connaissance des besoins : la formation devra également s'attacher à permettre aux professionnels de concevoir et d'organiser, dans leur bibliothèque, les services adaptés :

Pour la communication, l’accessibilité et l’organisation des espaces

Pour l’offre documentaire (qui ne doit pas se limiter à une réflexion sur la place des livres en gros caractères)

Pour la diversification des collections, place de la musique et de l'audiovisuel

Pour l’accueil et le renseignement : il faudra y intégrer la notion de convivialité et de recherche de relation avec les autres. Cela signifie avoir la capacité de gérer les comportements des différents usagers, jeunes et moins jeunes, pour éviter qu'un public ne chasse l'autre, mais pour éviter aussi de retomber dans une ségrégation non souhaitée par les intéressés.

Pour le rôle de la bibliothèque comme lieu du lien social et de la mémoire

Pour la formation de ces usagers aux nouveaux supports de l'information (rôle du médiateur ?)

Pour la politique d'animation tous supports favorisant les rencontres inter-âges (ateliers d'écriture, cercles de lecture, liens à tisser avec la petite enfance autour du conte, du souvenir, de la mémoire)

    4. La connaissance des partenaires : il faudra apprendre à repérer les relais, les médiateurs tous les autres professionnels pouvant être sensibilisés au problème du livre et de la lecture pour les personnes âgées.

     Ce type d’analyse et d’ouverture préconisée par Mme Oudjaoudi ne peut que contribuer à la vulgarisation des connaissances et aux échanges entre générations ; cette volonté d’ouverture de professionnels de la culture vers les professionnels qui oeuvrent autour de la personne âgée doit être appuyée et poursuivie pour que la notion d’approche trans- disciplinaire de la gérontologie qui nous est suggéré dans l’enseignement trouve une mise en œuvre pratique.

     La géragogie peut aussi s’inscrire dans l’enseignement à distance ; une étude sur les motivations des personnes âgées à suivre un enseignement à distance a été réalisée au Canada en 1988 (sur le site http://www.icaap.org/iuicode?151.6.2.4) et donne les conclusions suivantes :

Les personnes âgées suivent des cours à distance pour combler un besoin de dépassement et de défis. La formation à distance leur permettrait d'aller au maximum de leurs capacités physiques et intellectuelles. Apprendre à son rythme, ne pas avoir à se déplacer, ne pas avoir à se comparer à des étudiants plus jeunes et peut-être plus en forme intellectuellement est assurément une grande source de motivation.

Une nouvelle motivation, mise en évidence par la recherche, « Pour mon bien-être personnel »

L'inscription au cours de gérontologie, par les répondants plus âgés, est probablement un moyen de satisfaire ce besoin. La formation à distance permettrait donc aux personnes âgées d'atteindre plus facilement cet objectif de bien-être que les cours traditionnels. Ces derniers ont en effet souvent l'inconvénient de les obliger à se déplacer et à s'astreindre à un horaire et un rythme de travail qui ne leur conviennent probablement pas, compte tenu de leur âge et de leur état de santé.

Trois motivations retiennent l'attention dans l'analyse de cette catégorie : « Pour mon bien-être personnel » qui représente à elle seule plus du tiers des énoncés de cette catégorie, « Pour améliorer mes habiletés à servir l'humanité » et « Pour mieux comprendre les relations humaines »

La catégorie de questions liée au contact social est celle qui a recueilli le moins d'énoncés de motivation; ce qui n'est pas étonnant dans le contexte de la formation à distance. Toutefois, on peut voir que « Pour améliorer mes relations sociales » se démarque des autres motivations. Ceci s'explique par le besoin de plusieurs personnes âgées de briser leur isolement ou de trouver de nouvelles connaissances pour remplacer celles qui disparaissent. Les cours suivis en formation à distance deviendraient donc un outil pour aider la personne âgée à nouer de nouvelles connaissances plutôt qu'un moyen d'occuper sa solitude.

Il est significatif de constater que même dans un enseignement par correspondance, la personne âgée tient à améliorer ses relations sociales.

     L’éducation des aînés peut les aider à maîtriser le mécanisme de la sublimation décrit par Freud pour qui la gestion des crises peut se faire par trois mécanismes principaux :

Sur le plan pratique la psychogéragogie doit favoriser la compréhension, la tolérance, et le dialogue intergénérationnel.

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